Aujourd’hui j’ai le plaisir de vous présenter Mikaël Berthommier, l’un des rares préparateurs physiques professionnels engagé avec une équipe de basket professionnel français. Mikaël est en effet engagé avec Nantes Rezé Basket, l’une des locomotives structurelles du basket féminin français.
Ce club est en effet en plein développement structurel et sportif depuis quelques années. Fort d’un solide centre de formation, d’un staff sportif et technique complet et complémentaire, le club a notamment l’originalité de présenter ses effectifs à chaque début de saison par de magnifiques vidéos décalées. Le NRB possède aujourd’hui un solide effectif capable de jouer les troubles-fêtes parmis les équipes de haut de tableau.
Bonjour Mikaël, c’est un grand plaisir de pouvoir converser avec toi. Peux-tu te présenter tout d’abord pour ceux qui ne te connaissent pas
Salut Cédric, je me nomme Mikaël Berthommier, j’ai 36 ans et je suis actuellement le préparateur physique du Nantes Rezé Basket, club de ligue 1 féminine (1ère division). Je m’occupe également du club du rugby de Saint-Sébastien sur Loire qui évolue en Fédéral 3 (5e division). Je suis aussi le fondateur du site www.prepaphysique.fr . Enfin, je prends aussi en charge de manière individuelle plusieurs athlètes qui reviennent de blessure ou qui prépare une compétition (comme un trail par exemple). Je n’ai jamais côtoyé le sport professionnel en tant que pratiquant. J’ai toujours baigné dans le sport mais mon niveau de pratique n’a jamais touché l’excellence. J’ai exercé le football, le football américain, le handball, l’athlétisme, le fitness et je suis rentré pour la première fois dans une salle de musculation à l’âge de 15 ans ; ça a été une révélation pour moi. Sinon, je suis un touche-à-tout, quelqu’un qui s’intéresse à tout et qui ne demande qu’à s’enrichir de nouvelles rencontres et de nouvelles expériences. J’adore m’occuper de gens qui reviennent de blessures pour qu’ils retrouvent une forme optimale.
Quelles sont tes responsabilités au sein du club de Nantes Rezé Basket ?
Au sein du NRB, j’interviens avec l’effectif professionnel composé d’une douzaine de joueuses et avec le centre de formation. Je mets en place et prend en charge les séances de musculation individuelle. Je m’occupe de développer et de maintenir les qualités des filières énergétiques des joueuses. J’ai également l’objectif prioritaire de développer la vitesse et l’explosivité de certaines basketteuses. Enfin, lorsqu’une joueuse a été grièvement blessée, je la prends en charge en réathlétisation.
Peux-tu nous parler de la position et des relations que peut avoir un préparateur physique au sein d’un staff professionnel ? Comment cela se passe-t-il pour toi ?
Le préparateur physique doit, en mon sens, toujours être en relation très étroite avec le personnel technique. Il doit être au service de la discipline et donc au service des entraîneurs et des joueurs. Il doit y avoir le maximum de communication entre tous ces acteurs afin d’optimiser la préparation physique et lui donner un sens. Il ne s’agit surtout pas de faire de la préparation physique juste pour faire de la préparation physique. J’ai de la chance d’être dans une structure où la préparation physique n’est pas mise de côté et où j’ai un vrai rôle à jouer. Tout mon travail provient d’une concertation à 4 : Morgane Cardin (responsable du centre de formation, entraîneur des Espoirs et second assistant coach de l’équipe professionnelle), Emmanuel Coeuret (manager général du club et head coach), Romain Leroy (premier assistant coach et entraîneur des U17) et moi. Mon travail est validé en amont par l’encadrement technique. En ce sens, j’ai la chance que les coachs me fassent confiance et me laissent beaucoup de liberté. Donc je peux dire que ça se passe plutôt bien personnellement, ce qui n’est pas le cas partout.
Si tu devais juger le niveau des qualités des joueuses de ligue 1 féminine, où situerais-tu leurs atouts et leurs faiblesses ?
L’atout principal des joueuses de Ligue 1 féminine se situe dans l’adresse au panier et l’intelligence de jeu. Tactiquement, je les trouve très appliquées et elles ont une faculté assez exceptionnelle d’adaptation par rapport à une situation donnée. Néanmoins, pour ce qui est du physique, il suffit de regarder la finale des JO de Londres pour se rendre compte qu’il y a un déficit énorme pour franchir l’obstacle de l’ogre américain. Globalement, les joueuses manquent de vitesse, de force et de percussion.
Si tu devais juger la vision de la préparation physique dans le monde du basket français ?
Je crois que ça ne va surprendre personne si je dis que je trouve la préparation physique insuffisante dans le basket hexagonal. Généralement, dans les clubs de Ligue 1 et de ligue 2, la préparation physique est effectuée par le coach et l’assistant coach. Par exemple, à Bourges, plus grand club de basket féminin français, il n’y a personne qui est détachée spécialement pour la préparation physique de l’équipe. Il est tout de même incroyable de penser encore que le basket est un sport exclusivement tactique et technique (apparté : une récente étude empirique a annoncé près de 52 blessures significatives sur les 9 mois de compétition de la saison dernière à Bourges…). Les statistiques sont formelles, il y a beaucoup plus de ruptures des ligaments croisés antérieurs chez les joueuses de basket que chez les basketteurs. Plus généralement aussi, il y a plus de blessures chez les filles que chez les garçons. Pourquoi ? Tout simplement parce que la préparation physique est vue avant tout comme de la souffrance et qu’elle est négligée chez les filles. Cette saison à Nantes, seule Tatiana Troïna a eu une grave blessure (en septembre 2012). Je n’ai pas la prétention de dire que je fais du bon travail mais nous insistons énormément sur le renforcement musculaire préventif, sur le gainage et la proprioception. Et visiblement, ça nous réussit plutôt bien. Étant scientifique de formation, pour moi, il n’y a pas de hasard quand on se blesse.
Quelles qualités doit avoir un bon préparateur physique professionnel ?
Je pense qu’un préparateur physique doit avoir 2 qualités essentielles. La première est l’écoute de l’athlète dont il s’occupe. En fonction de son état de forme, le préparateur physique doit modifier ce qu’il a prévu pour que la qualité du travail soit toujours au rendez-vous. La préparation physique est avant tout un travail humain. La seconde qualité essentielle pour un préparateur physique est l’adaptabilité. En fonction du public qu’il a en face de lui, il doit prendre en compte tous les paramètres physiologiques et proposer des exercices qui permettent aux pratiquants de progresser. Le préparateur physique doit aussi s’adapter à la discipline, qu’il doit étudier en amont.
Je te remercie beaucoup pour ton temps. Le mot de la fin te revient :
Chaque athlète est différent. Chaque cas est une nouvelle aventure. Il faut toujours apprendre des autres. Il faut toujours se remettre en question. C’est ce qui fait que ce métier est enrichissant.